Le centre colonial des hauts-plateaux mexicains: Jalisco, Michoacàn, Guanajuato, Hidalgo et Puebla...
Du 26 octobre au 13 novembre 2010
Nous entrons dans l’état de Jalisco par une route de montagne qui nous mène du Pacifique aux hauts plateaux. Soudain, en nous arrêtant pour manger des tacos, nous avons la surprise de voir un camping-car américain… En nous approchant, nous apercevons l’autocollant suisse dessus ! Et oui, de nouveaux amis voyageurs ! François et Emily voyagent depuis 9 mois entre USA et Mexique, avec leur petit Axel (15 mois), dans l’idée de rejoindre un jour l’Argentine… Mais ils sont restés collés dans le coin après avoir rencontré une super famille qui les a adopté ! C’est ainsi que nous nous retrouvons à Tequila, capitale de la fameuse boisson, chez Micky et Rosa !
Nous passons 3 jours posés là, comme des coqs en pâte ! Cette petite bourgade est absolument charmante, avec ses maisons colorées et ses rues pavées, et ses habitants si gentils. C’est beaucoup plus aisé ici que tout ce que nous avons vu jusqu’à présent au Mexique ! Il faut croire que la Tequila rapporte… La ville fleure bon les effluves de distillerie, au petit matin … La plus grande d’entre elles, « Los Cuervos », occupe toute une rue de la cité ! C’est magnifique, on peut s’y promener dans les jardins ombragés, entre les bâtiments coloniaux aux enduits chaleureux, et aux magnifiques terres cuites… Et dégustation obligatoire de ce fameux alcool d’Agave bleue ! Viva la Margarita !
Et puis nos hôtes sont si adorables ! Micky, électricien à la retraite, est l’ancien maire de la ville : il connait tout le monde, et ne peut faire 3 pas dans la rue sans être arrêté 10 fois pour papoter ! Rosa, parfaite mère de famille, gère sa tribu avec grande douceur et finesse… Leur fille Rosy, 17 ans, adore jouer avec les filles, et leur fils Raùl, père de famille, vient déjeuner tous les matins avant d’aller au boulot ! Ils nous ouvrent toute grande leur petite maison, au jardin bien ombragé et agréable… Et nous dormons dans la rue, qui est bien tranquille. Un merveilleux accueil ! Nous goûtons aux spécialités culinaires locales… Les cocottes se font une cure de dessins animés ! Et Micky, dévoué, nous emmène nous promener dans les champs d’agave qui entourent la ville, nous fait découvrir un magnifique mirador sur le canyon du coin, qui regorge de mangues et d’avocats délicieux, et nous invite à profiter de ‘’la Toma’’ ! Ce sont des bains municipaux version locale, en fait des bassins aménagés pour profiter de l’eau pure de la petite rivière qui coulait ici ! C’est délicieux et magnifique ! Vue splendide sur la jungle du canyon… Un régal ! Nous allons aussi assister à une représentation culturelle étudiante, invités par le tonton de Micky : très mal ficelé, mais avec de jolies danses indiennes traditionnelles…
Bref, le moment de quitter Tequila est un peu douloureux… Les filles ont totalement adopté cette super famille ! Nous passons Guadalajara sans nous arrêter : cette ville de 6 millions d’habitants, la 2° du pays, est tentaculaire, et ne nous fait pas trop envie… Par contre, la banlieue de Tonalà est fantastique ! C’est le quartier des artisans ! Un atelier à côté de l’autre, des superbes meubles rustiques, de la céramique religieuse ou colorée pour les jardins, du verre soufflé trop beau… On ne sait plus où donner de la tête ! J’aurais envie de tout acheter, mais c’est là le drame du voyageur : se contenter de petits souvenirs, qui se casent dans un coin et ne risquent pas de casser ! Bivouac très sympa dans le grand parking herbeux d’un hôtel…
Nous continuons notre route vers les sud-est, et entrons dans le fameux état de Michoacàn, réputé terre de traditions des indiens Purépéchas. Le paysage agricole est charmant, avec de beaux petits champs mignons, des vaches, des forêts, des petits villages très vivants. Et voilà un bourg que nous attendions : Paracho, la capitale mexicaine de la guitare ! Ici, plus de 200 artisans font des guitares à la main ! Manu est comme un fou, il essaye toutes les guitares ‘’flamenca’’, et aurait bien craqué, s’il n’en avait pas déjà une dans la roulotte ! Mais soyons raisonnable… Un super luthier nous fait des démonstrations de flamenco, un vrai régal… Le village est aussi en ébullition, car ce sont les préparatifs de la Toussaint : le cimetière est une vraie fourmilière, les gens nettoient à grandes eaux, fleurissent, accrochent des couronnes de rubans… La dame de l’hôtel qui nous accueille cette nuit nous explique que beaucoup de monde est attendu pour cette fête si importante ici ! En tous cas le marché local du dimanche matin est carrément génial : pas un touriste, que des indiennes avec des chemises brodées, des jupes à fleurs, de longues tresses et des bébés dans le dos ! On s’y échange des fruits, des légumes, du bazar ménager, des habits, des fleurs… Que de couleurs, d’odeurs, et de saveurs ! De vie… Margot et Charlotte sont très impressionnées ! Et les gens sont si charmants avec nous, souriants, gentils… J’aime les Mexicains !
Un peu plus loin, à Uruapàn, nous passons la journée dans le parc national, en pleine ville, qui protège la source d’une grosse et belle rivière. Il y a un monde fou, qui vient profiter des chemins pavés et ombragés de cette jungle d’altitude (nous sommes à plus de 2000 m) ! Mais c’est hyper agréable, et trop joli … Quelques clavadistas (plongeurs de falaises), de belles fleurs, un élevage de truites… Un bon moment de détente ! Puis nous sommes accueillis chez Marie-Sol, de Servas, charmante psy qui vit avec sa mère et son frère dans une belle maison, où nous garons la roulotte dans la cour… Encore une super rencontre ! Mais on ne s’attarde pas …
Car lundi 1er Novembre est un grand jour ! C’est la fameuse « fête des morts » ! Et quand on a la chance d’être par là ce jour là, c’est à Patzcuaro qu’il faut se rendre ! C’est le centre religieux et mythique des Purépéchas … La petite ville, en bordure du lac du même nom, connait alors une émulation extraordinaire ! Les traditions sont ici très vivantes, et toutes les familles se retrouvent ici, ainsi que beaucoup de touristes, mexicains ou étrangers. Ca fait beaucoup pour ce beau village ! Une vraie fourmilière, où nous nous perdons dans les bouchons avec le camping-car… Et dans ce bouillonnement, nous retrouvons Micky et sa famille, ainsi que les Suisses ! Incroyable ! Nous essuyons ensemble un bel orage, au milieu du grand marché artisanal, et des stands de poteries, de lainages, de paniers, de masques en bois… Encore beaucoup de frustrations ! Nous passons la soirée au bord du lac, où doivent se faire les cérémonies des canoës pleins de bougies qui se rendent sur une ile, pour accompagner les âmes des défunts… Mais on ne verra rien de tout ça ! En fait, cela se fait en peine nuit… Nous assistons cependant au lancé du filet-papillon par les pêcheurs (très esthétique !), et nous régalons de friture de poisson en admirant les autels fleuris et plein d’offrandes, destinés aux défunts, qui ornent les jardins, les quais, les places… Puis nous allons bivouaquer devant l’hôtel que nous avons dégoté, sur une avenue hyper bruyante…
Le lendemain, visite du petit village de Santa Clara del Cobre : que des artisans du cuivre ! A l’ancienne, chauffé au feu de bois, puis martelé pendant des jours… Très impressionnant ! Il y a des choses très kitchs, et d’autres magnifiques ! Mais quel artisanat riche, dans cette région, c’est extra… Nous nous rendons ensuite à Tzintzuntzan ( !), au bord du lac de Patzcuaro : la folie de la veille s’est un peu calmée… La visite du site archéologique des Tarascos est chouette, et les restes de 5 pyramides religieuses, les yucatas, plaisent bien à Margot … Mais c’est surtout le cimetière qui est faramineux ! Nous n’avions pas voulu nous y rendre la veille, par respect, mais les familles ont campé ici pendant 2 jours ! Les tombes croulent sous des arrangements savants d’œillets orange, des offrandes de pains, de fruits, de verres de Tequila, c’est hallucinant ! Les gens se retrouvent ici, mangent, boivent rient… Ils attendent les âmes de leurs proches défunts, qui reviennent chaque année. C’est une fête à la fois grave et joyeuse, où l’on se souvient, on partage. Absolument génial mélange de catholicisme et de croyances indigènes ! J’adore… Nous avons en plus trouvé un super campement au bord du lac, chez José Luis, qui nous ouvre tout grand son jardin et nous donne du bois pour faire du feu ! Soirée grillades et guitare avec notre famille mexicaine d’adoption, extra…
Puis vient le terrible moment des aurevoirs… Micky rentre à Tequila, les Suisses descendent sur le Pacifique, et nous repartons plein Nord ! Bonne route à tous … Nous passons Morelia, puis entrons dans l’état de Guanajuato, terre coloniale par excellence. Le paysage devient plus clairsemé, plus désertique… Nous passons 2 jours dans la ville du même nom, cette fabuleuse ancienne cité de l’argent ! Installés sur notre parking de l’ancienne gare, à 2 pas du centre, nous pouvons flâner, explorer, admirer à notre guise les maisons colorées qui se jettent à l’assaut des montagnes, les multiples tunnels de pierres qui parcourent la ville (une vraie cité sous-terraine, dans les anciennes mines), les petits parcs sympathiques, les ruelles perdues… Quelle ville géniale ! Manu se fait couper les cheveux en plein air, derrière la roulotte… Et pourtant, il souffle un vent carrément froid ! On fait école… C’est ici le site du festival Cervantino, qui concentre chaque année des spectacles internationaux pour le plus grand festival culturel d’Amérique Latine ! Et nous sommes là pendant la dernière semaine… Nous profitons d’un spectacle de clowns québécois qui ravit les pépettes, et d’un spectacle espagnol de théâtre de feux d’artifice sur l’indépendance mexicaine… Car c’est en ces lieux que tout a commencé, il y a 200 ans ! Décidemment, cette ville a quelque chose de très européen… On adore !
Nous continuons, en passant par une très jolie route, vers Dolorès Hidalgo : sauvage et aride à souhait ! Puis nous arrivons à San Miguel de Allende, splendide petite cité coloniale aux maisons dans une harmonie de jaune, ocre et rouge, largement envahie par les gringos… C’est un peu le Maroc des USA, c’est ici que viennent s’établir de nombreux retraités, à la fibre un tant soit peu artistique : il y a ici une école d’arts reconnue ! Tous est assez chic, mais nous finissons par trouver une super bivouac, sur le parking d’une ancienne usine textile reconvertie en ateliers d’artistes… Parfait ! On s’installe pour 3 jours… C’est le week-end, les filles repartent à fond dans leurs play-mobiles… Tous les matins, Margot accompagne Manu chercher du pain frais et du jus d’orange juste pressé (on a pris nos habitudes, depuis qu’on est au Mexique !). Nous déposons le linge chez une blanchisseuse (ici, pas de lavomatic en self-service !). Et puis, on prend le temps de se balader, de visiter des ateliers d’artistes, de jouer au parc, de humer l’air du temps sur la place principale pleine de vie et de mariachis. L’ambiance est vraiment très agréable, mélange de traditions et de tourisme artistique… Et puis c’est magnifique ! Par contre, dès que le soleil se couche, ça caille carrément ! On ne pensait pas avoir si froid au Mexique… Du coup, dimanche après-midi, on va aux thermes ! Génial ! Rustiques, avec des bassins d’eau très chaude, recouverts de toits ronds, genre hammam, et des piscines extérieurs plus fraiches… Un bon moment de détente !
Nous repartons vers l’Est, lorsque nous tombons par hasard sur un truc incroyable : un rassemblement de plus de 1000 cavaliers, en belle chemise et chapeau de paille ! Epatés, nous nous arrêtons… Il s’agit d’un pèlerinage à cheval, jusqu’à San Martin Terrero, et certains font plus de 150 km en 3 jours ! C’est absolument splendide ! Il y a là une quasi-exclusivité d’hommes, tous plus fiers les uns que les autres, de tous âges, avec des gamins coincés sur l’encolure ou la croupe du cheval, qui se retrouvent chaque année pour aller faire bénir leur monture ! Allez, on fait demi-tour, et nous les suivons pendant plus de 2 jours… Quelle colonne le long de la route ! Jamais vu ça… Les caballeros acceptent vite ce drôle d’engin qui les suit et s’incruste, et on nous accueille avec de grands sourires, des bières, des jus de fruits… On se sent vite faire partie de la troupe ! Nous campons le premier soir dans un tout petit village paumé, au bout d’une mauvaise piste sableuse… Une fanfare à la Kusturika joue dans un coin, et certains cavaliers viennent boire un coup au bar sans mettre pied à terre ! On se croirait dans un film… Le 2° jour, nous faisons notre route tous seuls, et les filles et moi faisons même un bout de pèlerinage à pied, pour arriver au fameux village où se trouvent les reliques de San Martin. Il y a un monde fou, ça vient de tous les coins ! En pleine semaine… Mais au Mexique, cela n’a aucune espèce d’importance ! Nous retrouvons le soir ‘’notre’’ troupe de cavaliers qui arrive et s’installe dans un grand pré… Et après une nuit ponctuée de chants, de hennissements, et de pétards (pas une fête ici sans les fameux cuotès), lever à 5h30 ! Il fait nuit et froid, mais c’est l’heure de la bénédiction des chevaux, à grand coups de rameaux plongés dans des sceaux d’eau bénite ! En fait, aujourd’hui sont attendus plus de 8000 cavaliers, sans compter les hordes de marcheurs et de cyclistes qui arrivent en flot continu ! Une vraie folie… Mais c’est carrément émouvant… Par contre, lorsque nous voulons repartir, notre engin se trouve bloqué, à contre sens, sur une piste affreuse, avec des milliers de chevaux et de marcheurs qui déferlent en braillant, en chantant, et en lançant des fusées ! Vision hallucinante… Mais Manu s’en sort comme un chef, et se fraye un chemin, tout en traversant 2 gués impressionnants ! Ouf… Quelle expérience !
Cette fois, on reprend la route. Nous passons Quéretaro, et entrons dans l’état d’Hidalgo. Pause dans la ville de Tula : il y a là un très beau site archéologique, les restes de la capitale des terribles Toltecs ! Deux belles pyramides, des immenses statues de guerriers, des terrains de jeux de balle, et de nombreuses gravures de sacrifices humains… Margot, effrayée et intriguée, veut tout savoir ! C’est vrai que ça interpelle… Puis nous contournons la ville monstrueuse de Mexico, et bivouaquons sur le parking d’un hôtel, à San Juan Teotihuacan…
La cité légendaire de Teotihuacan ! Que de fantasmes et de rêves cela réveille t-il, non ? Une ville immense, qui a géré un territoire gigantesque de -1000 avt JC à 1300 ap JC, avec jusqu’à 150000 habitants ! L’allée des morts est très impressionnante, bordée par les fabuleuses pyramides de la lune et du soleil… Nous sommes à 2300 m d’altitude, et la montée des marches sous un soleil de plomb est harassante ! Mais quelle vue, quel sentiment intense ! Les filles sont à fond… Il y a des très belles peintures, préservées dans des parties sous-terraines, c’est incroyable… Extra !
Nous rejoignons ensuite l’état de Puebla, où une famille Servas nous attend, à Cholula. Quelle galère pour trouver leur maison, dans ces immenses banlieues ! Mais Claudia, Javier et leurs enfants nous accueillent superbement bien … Soirée tequila et bonnes rigolades ! Par contre, nuit affreuse : l’église du village prépare sa fête, et d’affreux pétards nous assourdissent pendant toute la nuit ! Ils sont fous ces mexicains… Le lendemain, lessives, évaluations pour Margot, repos… L’église baroco-indigène d’à côté, à Tonanzintla est absolument hallucinante ! Pas 1 cm2 de repos pour l’œil, avec des anges qui ressemblent à des divinités aztèques, c’est fou ! Les filles jouent avec les enfants du quartier, c’est extra… Elles commencent à se débrouiller avec leurs 3 mots d’espagnol ! La soirée est entachée par l’annonce du décès d’une cousine de Javier, le matin même dans un accident de bus… Terrible ! On a un peu l’impression d’être en trop, mais nos hôtes restent très ouverts…
Allez, cette fois, on repart plein Sud, vers un autre Mexique ! Après plus de trois semaines dans la zone centrale du pays, toutes nos angoisses liées à l’insécurité du pays se sont envolées… On a adoré ces hauts-plateaux coloniaux ! Rencontres de personnes plus qu’adorables, superbes villes coloniales, paysages envoûtants… Il y a tant à faire ! Ce pays nous bluffe totalement, et on imagine déjà combien il va nous être difficile d’en sortir…